Le déboisement en Haïti
Après des siècles d'exploitation massive de ses forêts, Haïti se retrouve à l'heure actuelle pratiquement dépourvu d'arbres. Le niveau de déboisement y atteint 98 % de la surface de son territoire; un triste constat pour un endroit autrefois reconnu pour sa végétation luxuriante. Dans ce pays, le plus pauvre de l'hémisphère occidental, la déforestation entraîne une multitude de problèmes environnementaux et menace la survie de la population.
La déforestation du territoire haïtien a commencé il y a très longtemps. Dès le début du XIXe siècle, le pays a dû payer une indemnité à la France pour que cette dernière reconnaisse son indépendance. Des tonnes de bois, dont beaucoup d'acajou, ont été coupées pour payer la dette. Aujourd'hui, la production du charbon de bois est une des causes de la déforestation en Haïti. Dans un pays où près de 80 % de la population n'a pas accès à l'électricité, le bois représente souvent le seul combustible disponible.
En outre, le charbon obtenu constitue un revenu supplémentaire pour les paysans qui doivent souvent survivre avec moins d'un dollar par jour. Bien qu'ils soient conscients de la problématique de la déforestation, de nombreux Haïtiens dépendent de la coupe des arbres et de la production de charbon de bois pour pourvoir à leur subsistance.
Les problèmes engendrés par le déboisement sont multiples. La transformation des surfaces boisées en cultures de subsistance mal adaptées appauvrit les sols qui deviennent moins fertiles. Dépourvu des arbres qui retiennent les sols et les eaux, Haïti est en proie aux sécheresses, aux inondations et aux glissements de terrain qui sont alors plus fréquents. Haïti était donc plus vulnérable lors du passage de l'ouragan Jeanne en 2004 qui a entraîné la mort de milliers d'Haïtiens dans les coulées de boue et les inondations.
La situation est urgente pour Haïti et le reboisement doit demeurer une priorité dans le processus de développement du pays. À ce jour, des initiatives ont été mises sur pied dans les communautés haïtiennes pour impliquer la population locale dans la démarche de reboisement. Il est d'ailleurs possible pour les gens d'ici d'offrir une aide financière pour appuyer ces projets de développement prometteurs. Bien qu'il soit probable que la démarche dure encore plusieurs années, les progrès en matière de reboisement constitueront sans aucun doute un fer de lance pour l'avenir d'Haïti.
Saviez-vous que?
- Entre 10 et 20 millions d'arbres sont coupés annuellement en Haïti.
- L'utilisation du bois et du charbon de bois totalise 80 % de la consommation énergétique en Haïti.
- Chaque année, 15 millions de mètres cubes de sols montagneux sont emportés vers la mer, à défaut d'une végétation adéquate pour retenir les sols.
- Le revenu moyen des paysans haïtiens est de 115 $ par an.
Projet de reboisement de Sainte-Suzanne en Haïti
La commune de Sainte-Suzanne est située au nord-est d'Haïti, près de la frontière avec la République Dominicaine. Un grave problème de déforestation affecte la communauté et nuit à son développement. Le Comité de Solidarité/Trois-Rivières collabore avec l'Institut de recherche et d'animation technique en aménagement du milieu (IRATAM), pour mettre en oeuvre un projet de reboisement dans cette commune de 23 000 habitants. La participation de plusieurs paysans et paysannes de la région permettra en outre de mener le projet à terme.
À une certaine époque, les terres montagneuses de Sainte-Suzanne produisaient l'un des meilleurs cafés au pays. Malheureusement, la chute des prix du café, dans les années 1990, ainsi que le contrôle étranger des moyens de production ont accéléré le processus de dégradation de l'environnement. En effet, les paysans ont été forcés de remplacer les cultures de café par une culture de subsistance mal adaptée au sol des montagnes. En plantant de l'igname, des haricots et de la pistache, entre autres, on a rendu la terre de moins en moins fertile. De plus, l'extrême pauvreté et le manque d'électricité et d'essence ont obligé les paysans à couper les rares arbres pour en faire du bois de chauffage ou du charbon de bois. La situation est aujourd'hui critique puisque l'absence de couverture végétale aggrave les conséquences reliées aux pluies abondantes, notamment lorsque les ouragans frappent la région. Il faut savoir que les terres dépourvues de couverture forestière ne parviennent pas à retenir l'eau de pluie; les inondations prennent alors des proportions colossales et mettent en péril la vie des habitants.
Le projet de reboisement vise à mettre en action plus de 750 paysans et paysannes de Sainte-Suzanne. Ces participants auront la charge de planter et faire croître 50 000 plantules par année. Le projet se déroulera en plusieurs étapes qui précéderont la mise en terre des nouveaux arbres. D'abord, des participantes seront formées pour prendre en charge les pépinières et faire grandir les plantules avant qu'elles ne soient prêtes à être semées. De leur côté, les paysannes et les paysans recevront une formation qui leur enseignera comment planter et protéger les plantules. Une partie importante du projet sera aussi consacrée à informer la population des solutions au déboisement et à susciter son appui et sa participation dans la démarche de reforestation. Enfin, la distribution et la mise en terre des jeunes arbres marqueront le début du reboisement de Sainte-Suzanne.
Le projet permettra de faire grandir des arbres dont les fruits nourriront la population. La production fruitière excédentaire générera des surplus qui apporteront un revenu supplémentaire à la communauté. De plus, les espèces plantées seront visitées par les abeilles qui pourront alors produire plus de miel, ce qui enrichira les apiculteurs de la région. En augmentant le pouvoir économique des membres de la communauté, le projet pourra donner à ceux-ci la possibilité de recourir à d'autres sources d'énergie que le charbon de bois. Enfin, le sol qui accueillera les arbres sera plus riche et davantage en mesure de retenir les eaux, diminuant ainsi les risques d'inondations.
Une plantule coûte environ 25 sous à produire, de la semence à la mise en terre. Pour planter 100 000 arbres et changer la qualité de vie des habitants de Sainte-Suzanne, il faudra donc débourser 25 000 $. Compte tenu des retombées considérables qu'aura le projet sur la communauté, il s'agit d'un moyen peu coûteux d'améliorer la situation des paysans et de leur environnement.